Le Portugal au XIXe sicle

" ... On ne trouve pas en ce pays, comme en Espagne, ces vastes centres d'attraction provinciale, ces villes l'emportant toutes sur la capitale par la puissance des souvenirs et rivalisant avec elle d'influences et de richesses. On y chercherait vainement ces contrastes de moeurs et d'origine, qui, tout dangereux qu'ils soient au point de vue politique, n'en donnent pas moins au sol des Espagnes un charme indfinissable. L'tranger qui parcourt les domaines des rois catholiques ne sort pas d'une province pour entrer dans une autre, sans respirer dans un monde et comme dans un sicle nouveau. Les pays basques ont leurs habitudes libres et guerrires, Burgos et les Castilles leurs moeurs graves et srieuses, Madrid ses traditions de cour encore imposantes, Tolde sa science thologique, la Manche ses moeurs agricoles, l'Andalousie sa grce et ses plaisirs brillants comme son soleil, les villes maritimes leurs ides librales et leur gnie mercantile. Rien d'analogue en Portugal. De l'extrmit du Duero la cte mridionale des Algarves, il n'est pas un coin de terre, Porto et Lisbonne excepts, qui ne soit soumis aux mmes influences, o la vie ne se colore d'une mme teinte. Les jalousies provinciales n'ont oppos, en Portugal, nulle rsistance aux tentatives de l'cole librale, et si celles-ci s'y sont si longtemps brises contre des obstacles non moins invincibles que dans le royaume voisin, c'est des causes fort diffrentes qu'il faut l'attribuer. Que faire, en effet, d'une population dont l'indolence forme le caractre distinctif, et qui, si elle ne se lve pas violemment, comme en Espagne, contre les rformateurs, les a toujours regards faire avec une apathie cent fois pire qu'une opposition dclare ? Accoutum des privations qui n'en sont pas pour lui, le Portugais vgte plus qu'il ne vit sous un ciel doux et pur..."